Tensions autour du partage de données de vaccination par les pharmaciens
Certains médecins estiment que le risque de dérive est réel. L’association pharma belge rappelle
le cadre très strict de cette mesure, mise en place pour aider à lutter contre la pandémie.
En fait que le pharmacien soit informé que le patient a ou non reçu le vaccin est justifié pour autant bien sûr qu’il soit effectivement dans une relation thérapeutique réelle et consentie avec le patient. A l’inverse, l’envoi à Farmaflux de données que le pharmacien a recueillies dans la confidence de sa conversation avec le patient ne l’est pas. Il n’est pas couvert par une autorisation du comité de sécurité de l’information, le pharmacien n’a pas reçu le consentement du patient et, dans la plupart des cas, cet échange de données se fait à son insu. »
Données anonymes et non enregistrées
L’Association pharmaceutique belge (APB) se défend de jouer avec les données personnelles des patients reçus dans les officines. « Tout d’abord, ce recueil de données liées à la vaccination est entouré d’un cadre légal strict qui a été in fine validé par le comité de sécurité de l’information mais qui, au préalable, a été discuté et débattu au sein du groupe de travail chargé de la sélection des patients à risque. Groupe auquel participaient les associations de patients, mais aussi de médecins comme l’Absym», précise Alain Chassepierre, porte-parole de l’APB. «Le flux des données médicales de vaccination suit un processus très précis au sein de la pharmacie où le patient a ses habitudes. Et surtout, les données récoltées ne sont pas enregistrées. Et si le patient exprime le souhait de ne pas être vacciné et de ne plus être embêté avec cela, le pharmacien désactive le pop-up et le patient ne sera plus relancé sur la vaccination. Quant aux questions plus précises dont parle monsieur Simon, il s’agit de données uniquement récoltées dans un cadre scientifique et complètement anonymisées. Il n’est pas possible pour un pharmacien X de savoir que Monsieur Y a refusé la vaccination pour telle ou telle raison. »
Pour le Groupement belge des omni-praticiens, autre syndicat de généra-listes, si la vigilance reste de mise en ce qui concerne le partage des données médicales, le processus mis en place au sein des pharmacies dans le cadre strict de cette pandémie est parfaitement légal et sûr. « Nous avons la garantie que toutes les données liées à la vaccination seront effacées une fois la pandémie terminée», assure Paul De Munck, président du GBO. «Quant aux données personnelles plus précises qui sont demandées, elles sont effectivement récoltées de manière anonyme et servent un but scientifique. Nous devons comprendre quelles sont les raisons principales qui poussent les gens à l’hésitation vaccinale pour mieux lutter contre celles-ci. C’est à cela que doivent servir ces données, mais jamais on ne pourra les relier à une personne précisément. »
Une réaction corporatiste ?
Paul De Munck ne peut s’empêcher de voir une réaction corporatiste derrière celle du docteur Simon. «Nous ne sommes pas ici en train de donner un blanc-seing aux pharmaciens pour, à terme, vacciner en officine ou réaliser des actes médicaux », précise-t-il. « Ces dispositions visent à lutter ensemble contre cette pandémie et, pour cela, nous avons besoin de tout le monde, y compris des pharmaciens, dont on sait qu’ils ont la confiance des patients. Ces mesures ont donc une durée limitée dans le temps. Je trouve cela dommage que ce débat puisse éclipser cette lutte commune, d’autant qu’il pouvait avoir lieu sereinement au sein des organes de concertation prévus à cet effet. »
Une position partagée en substance au sein de l’Absym, dont le docteur Simon est pourtant administrateur. «A l’Absym, nous avons toujours été vigilants quant à l’utilisation des données médicales qui pourrait être faite au cours de cette pandémie », explique le docteur Philippe Devos, président. « Mais nous ne voulons pas brouiller le message auprès du grand public pour qui le pharmacien est un interlocuteur de confiance. L’objectif reste de mener un maximum de gens à se faire vacciner et, pour cela, nous avons besoin de tout le monde, y compris des pharmaciens. »